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➤ À retenir : Les éléments clés d’un tram-train – Évolution du matériel roulant – Les réseaux tram-train en Europe
Karlsruhe, 300.000 habitants, est située sur le grand axe ferroviaire Francfort-Bâle, tout au nord de la région très touristique de la Forêt-Noire. La ville avait déjà une expérience d’implantation de tram sur une ancienne ligne de chemin de fer. C’est en effet en 1957 qu’est née la Albtal-Verkehrs-Gesellschaft (AVG), laquelle reprend en main une ancienne ligne de la DEBG qui va mener le tram à quitter l’agglomération au sud par étapes successives vers Ettlingen puis Busenbach et enfin Itterbach en 1966. Sur cette ligne, le tram utilise ses propres règles ainsi que le courant continu 750V.
Dans les années 70, la ville veut réactiver d’autres voies qui sont encore la propriété de la Deutsche Bahn, avec laquelle d’intenses négociations doivent être entamées, en dépit de l’utilisation faible et exclusivement marchandise de la ligne. C’est que les critères ferroviaires sont obligatoirement d’application lorsqu’on doit emprunter les voies ferrées dites « grand train ». Le 23 décembre 1977 un contrat d’affermage entre DB et AVG est finalement conclu qui autorise l’AVG d’une utilisation partagée de la ligne fret avec la DB jusqu’à Neureut.
C’est finalement de 25 septembre 1992 que le premier vrai tram-train bi-tension du monde devient réalité. Tout va alors très vite avec la multiplication exponentielle du trafic. On parle dès lors du « Karksruher Modell » dont le concept va se répandre dans le monde entier ! Autour de la ville, de prolongations en ouvertures de lignes, on en arrive à un vaste « S-Bahn » version tram dont le réseau couvre actuellement plus de 530 kilomètres, jusqu’au fin fond de la Forêt-Noire allemande. Particularité de ce tram-train : à la gare principale (Karlsruhe Hauptbahnhof), les trams-trains quittent les voies ferrées et se dirigent vers le centre-ville en tant que trams urbains classiques.
Côté technique, il a fallu tout d’abord définir qui certifiait quoi. Les trams relèvent en effet du BOStrab, qui est une ordonnance sur la construction et l’exploitation de tramways et qui énumère les exigences de base et les dispositions relatives à la sécurité de l’exploitation des tramways. Mais quand on emprunte les lignes ferrées de la DB, cela relève de l’EBO, l’organisme qui gère le Règlement de Construction et d’Exploitation ferroviaire. Les deux entités ont ainsi octroyé les permis d’exploitation de tram-train bicourant, 750V DC et 15kV AC.
Zweisystem-Stadtbahnen
Cette intégration de voies ferrées suburbaines où circulent de moins en moins de trains de fret mais de plus en plus de tram donne l’élan nécessaire à l’expansion du tram. Comme en plus la destination majeure des utilisateurs est le centre de Karlsruhe, l’idée de le relier en direct sur d’autres axes apparaissait comme une évidence. Problème, cela réquérait d’emprunter cette fois des axes DB fort fréquentés, comme la grande ligne Cologne-Bâle si on voulait aller vers Rastatt ou Achern.
C’est là que naquit l’idée du tram Zweisystem-Stadtbahnen, c’est à dire un tram bi-tension 750V DC/15kV AC muni des indispensables critères ferroviaires pour être admis sur les voies de la grande Deutsche Bahn. En 1985 une étude financée par le ministère fédéral de la recherche propose des connections sans trop de frais avec les voies du chemin de fer fédéral allemand, sas caténaire inclus. En 1986, une rame GT6-80C se voit installer temporairement un transformateur, un redresseur et un self de lissage dans l’habitacle, pour des premiers essais en bi-tension.
Une autre expérience est tentée avec un tram muni de batteries et un troisième carrément bi-mode diesel et électrique, ces deux derniers n’étant en définitive pas retenus vu les technologies d’époque. C’est donc sur la base de l’expérience acquise avec le premier véhicule que le constructeur Duewag développe en collaboration avec ABB Henschel la production du premier tram bi-tension GT8-100C / 2S. Le premier exemplaire sort en 1991 et on prépare une vraie exploitation mixte.
1992
Karlsruhe souhaitait à l’origine relier la ville de Wörth mais la DB s’y opposa vu le trafic déjà intense qui y régnait. Elle proposa plutôt le tronçon à l’Est, vers Bretten, moins densément utilisé. Comme ce dernier n’était pas prêt à l’arrivée des premiers tram-trains de Duewag, ceux-ci purent momentanément faire des tests grandeur nature jusqu’à Pzorheim, une ville située sur le grand axe ferroviaire vers Stuttgart.
C’est finalement de 25 septembre 1992 que le premier vrai tram-train bi-tension du monde devient réalité. Tout va alors très vite avec la multiplication exponentielle du trafic. On parle dès lors de « Karksruher Modell » dont le concept va se répandre dans le monde entier ! sur place, de prolongations en ouvertures, on en arrive à un « S-Bahn » version tram dont le réseau couvre actuellement plus de 400 kilomètres, les trams-trams circulant dorénavant sur toute l’étoile ferroviaire, y compris les lignes à voies uniques.
Depuis le centre-ville, l’accès aux voies ferroviaires se fait notamment à proximité de la gare principale (Hbf), côté Bâle pour les trafic vers le sud mais aussi en d’autres endroits plus éloignés, comme à Durlach ou Sollingen. Dans nombre de cas, le tram-train bénéficie de tronçons parallèles aux voies ferrées.
La signalisation ferroviaire étant d’usage, on reste donc bien dans le cas d’un tram-train. La première ligne vers Bretten, numérotée B à l’origine, a poursuivi son extension sur une voie non-électrifiée de la DB jusqu’à Heilbronn, en 2001, une ville de 130.000 habitants située à 72km de Karlruhe. Elle porte aujourd’hui le numéro S4. Au sud, une autre ligne S31/S41 mène le tram-train jusqu’à Freudenstadt (82km) en desservant au passage les pistes de ski de fond de la Forêt-Noire, quand neige il y a… In fine, le tram-train / « S-Bahn » de Karlsruhe a fini par rejoindre les S-Bahn voisins !
Cet enchevêtrement s’accompagne aussi de la reprise en main progressive par la DB du trafic suburbain, passés les épisodes successifs où la DB refonde sa structure, aux grandes époques de Heinz Dürr et Hartmut Mehdorn. Ainsi, c’est la DBAG qui dispose déjà d’une ligne S3 Mannheim-Karlsruhe. L’AGV a donc dû s’aligner et renuméroté sa ligne S32 pour faire la différence. Idem à l’Est, à Bietigheim, terminus du S5 de…Stuttgart. Heilbronn a repris à son compte la ligne S4 qui court jusqu’à Öhringen depuis 2005. Et ainsi de suite.
Le réseau
L’AGV – Albtal-Verkehrs-Gesellschaft mbH -, a été fondée en 1957 en tant que société ferroviaire exploitant l’Albtalbahn, la ligne Busenbach-Ittersbach et la ligne d’Ettlingen. L’Albtalbahn, anciennement à voie étroite, est passé entre 1957 et 1966 à la voie normale UIC et a été reliée au réseau de tramway de Karlsruhe, qui est lui-même en 1.435mm.
Depuis 1975, l’AVG a pu étendre ses activités en construisant de nouvelles lignes de chemin de fer, en utilisant des lignes de chemin de fer existantes de la Deutsche Bahn et en reprenant des lignes de chemin de fer abandonnées pour y mettre en place un système de train léger dans la région de Karlsruhe. Près de 288 kilomètres de lignes lui appartiennent.
En réutilisant toutes ces petites lignes abandonnées par la DB, l’AGV les a transformé en lignes purement tramway électrifiées en 750V DC. Quant au réseau exploité, il déborde sur des tronçons exploités en 15kV par la DB, d’où l’utilisation de matériel roulant Zweisystem. Zweisystem et Gleichstrom peuvent en outre pénétrer dans la ville de Karsruhe comme n’importe quel tram classique. C’est cette double faculté qui définit le mieux ce qu’on appelle un tram-train.
Il ne faut pas confondre avec le KVV – Karlsruher Verkehrsverbund (en vert) -, qui est une entité tarifaire couvrant une partie des lignes de tram-train Zweisystem (en rouge), des lignes de tram Gleichstrom (en bleu) et des lignes bus (non figuré) de toute la région. On remarque que les lignes Zweisystem de l’AVG sortent de l’entité tarifaire du KVV et concernent dès lors des entités tarifaires voisines (Achern, Eutingen, Bad Wildbad, Öhringen,…). Pour le dire autrement, l’aire du KVV est plus restreinte que celle où opère l’AGV, bien plus vaste.
Au total aujourd’hui, le réseau de Karlsruhe s’étend désormais sur 544 kilomètres. Le réseau urbain proprement dit ‘Straßenbahn‘ atteint près de 75 kilomètres. La ligne la plus longue est la S4 qui relie Achern à Öhringen et qui met environ trois heures pour parcourir 145 kilomètres. Les statistiques 2022 ont montré que l’AVG avait produit un trafic de 19,9 millions de kilomètres. Le réseau actualisé (sans les bus) est représenté ci-dessous :
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